Darkness doesn't mean Evil - pv Naoki

Depuis combien de temps es-tu enfermé dans cette maison ? Tu ne sais plus bien. Ce sceau sur la porte t’empêche de t’en échapper, tu n’as le droit que de prendre l’air à ta fenêtre, là où personne ne peut te voir. Tu comprends, quelque part, tu as fait peur à tout le monde, autant qu’eux, t’ont fait peur. Mais tu n’as aucune envie d’être ici. Est-ce que ça pourrait être pire, dehors ? Tu n’en es pas sûr. Au moins, tu pourrais y croiser un peu de vie.
Enfermé entre ces murs, tu ne peux que passer tes journées à réfléchir, à ressasser. Tenter de te remémorer cette soirée qui t’a fait arriver ici. Essayer de te rappeler comment tu as pu arriver dans un endroit pareil. Qu’as-tu réellement fait à Kaede ? Il y avait trop de sang sur tes vêtements pour que ce ne soit que le tien. Alors, c’était le sien ? Tu ne sais plus.
Et ne pas savoir est en train de te rendre fou. Au fur et à mesure des jours qui passent, tes blessures évoluent. Les ecchymoses deviennent plus ternes, s’éclaircissent par endroit. Tes plaies ouvertes restent couvertes de bandages, pour les protéger. Tu commences à avoir un peu moins mal partout, mais ce n’est pas encore miraculeux. Si ton corps commence à aller mieux, ton esprit, lui, n’est toujours pas disposé à avancer.

Ce matin, en te réveillant, tu t’attendais à une nouvelle journée comme une autre. Tu aurais peut-être la visite d’une nouvelle personne, ou bien de quelqu’un que tu as déjà vu. Tu te doutes bien que ton repas te sera livré en coup de vent avant de voir cette porte se refermer, comme à chaque fois. Insupportable…

Pourtant, ce n’est pas ce qu’il s’est passé. Alors que tu étais installé près de ta fenêtre, comme d’ordinaire, il y a eu ce bruit de papier froissé, signifiant qu’on venait de retirer le sceau t’enfermant. Par réflexe, tu as relevé les yeux vers la porte, t’attendant à avoir un invité faire irruption mais… à la place, on frappa. Pire encore, on demande l’autorisation de pénétrer chez toi.
Incrédule, tes saphirs jaugent la porte, comme une proie tapie dans l’ombre de son prédateur. C’est une voix que tu n’as encore jamais entendue, mais quelqu’un qui te demande l’autorisation de pénétrer… Tu ne comprends pas.

Avec lenteur, tu quittes ton perchoir pour laisser tes pieds nus reposer sur les tatamis au sol. Avec la légèreté d’un félin, tu t’es approché de la porte jusqu’à y apposer tes mains, frottant légèrement ta joue contre le bois froid en fermant les yeux.
Tu es épuisé, n’est-ce pas ? Est-ce une bonne idée de laisser quelqu’un que tu ne connais pas pénétrer ton territoire lorsque tu es à ce point vulnérable ? Tu n’en es pas sûr. Mais en même temps, la solitude est en train de te ronger, beaucoup trop.

Alors, tout doucement, tu appuies sur la poignée de porte pour l’ouvrir. Tu t’écartes, restant invisible au regard de l’autre. Tu veux rester caché, jusqu’à ce qu’il soit entré. Et une fois qu’il est dans la maison, tu refermes en douceur la porte. Tu n’as pas croisé le regard des villageois, tu as fait les choses correctement pour ne pas les effrayer. Quel enfant docile.
Enfin, tu te tournes face au géant ayant fait son apparition sur ton territoire, relevant tes perles céruléennes vers lui pour l’analyser bien malgré toi.

- Je m’appelle Naoki.

Ta voix rauque sonne plus vide que tu ne l’aurais cru. Tu sembles toi-même surpris de sa sonorité en l’entendant. Toi qui pensais que ces quelques jours sans cigarettes feraient du bien à ton corps… Apparemment, tu l’as déjà trop abîmé.
Tel un chaton partagé entre la curiosité et la peau, tu restes dos à la porte, ne le lâchant pas des yeux. Tu t’attends d’un instant à l’autre à devoir ouvrir brusquement cette porte pour prendre la fuite. Tu ne sais jamais comment les gens vont réagir en étant face à toi, et c’est peut-être ce qui t’inquiète le plus. Peut-être est-il, comme Sasori, venu pour t’observer. Ou bien peut-être est-il envoyé pour faire des tests sur toi, pour te faire du mal. Tu ne sais plus quoi penser de ce monde à force.

- Pourquoi vouloir venir ici ? Les villageois ont dû tenter de vous en empêcher pourtant. Ils disent que je suis dangereux.

Ou comme le dirait une certaine personne : que tu n’es qu’un Yokai caché parmi les hommes.